Parmi les 305 articles de la loi dite « climat/résilience » promulguée le 22 aout dernier, nombreuses sont les dispositions qui modifient le droit de l’urbanisme, à commencer par la proclamation de l’objectif visant à limiter l’artificialisation des sols.
• A compter du 1er juillet 2023, les constructions d’une certaine ampleur devront prévoir la mise en oeuvre d’un dispositif de production d’énergies renouvelables ou bien d’un système de végétalisation afin de favoriser la « préservation et la reconquête de la biodiversité » (article 101). Toutefois, l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme pourra accorder des dérogations au cas par cas en raison d’obstacles techniques ou économiques à la mise en place de ces dispositifs.
• Lors de la délivrance d’un permis de construire, celui-ci pourra autoriser le pétitionnaire à compenser la réalisation de certaines aires de stationnement des véhicules motorisés imposée par le PLU par la création d’espaces dédiés au rangement des vélos, selon un ratio de 6 places pour les vélos par aire de stationnement (article 117).
• Disposition phare de la loi, l’article 191 pose le principe selon lequel l’artificialisation des sols doit être réduite de 50 % dans les dix prochaines années. Toutefois, la même disposition permet au législateur de moduler à l’avenir le respect de cet objectif, notamment en fonction des territoires. On notera notamment que l’article 192 définit l’artificialisation des sols comme « l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ». Dans la foulée, l’article 194 précise que cet objectif devra être introduit dans les différents documents d’urbanisme dans un délai maximal de cinq ans, le recours à la procédure de modification simplifié étant expressément prévu par cette même disposition. Et l’article 215 de la loi impose désormais aux CDAC de prendre en compte l’artificialisation des sols issue du projet lors de l’examen d’une demande d’autorisation d’exploitation commerciale.
• Le maire (ou le président de l’EPCI si ce dernier est devenu compétent en matière de PLU) devra au moins tous les trois ans présenter à l’organe délibérant un rapport consacré à l’artificialisation des sols pratiquée au cours des années précédentes. A l’issue de cette présentation, un débat et un vote devront avoir lieu sur cette question (article 206).
• La notion de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers est également définie par l’article 194 de la loi. Celle-ci s’entend comme » la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés sur le territoire concerné ».
• Le même article 194 prévoit que, désormais, le PADD ne pourra ouvrir à l’urbanisation des espaces naturels, agricoles ou forestiers, que si les espaces urbanisés ont effectivement déjà été utilisés.
• Les Orientations d’aménagement et de programmation continuent de s’enrichir. Elles devront désormais comporter un échéancier pour l’ouverture à l’urbanisation et l’aménagement des zones AU, le délai initial de 9 ans pour procéder à cette opération étant ramené à 6 ans (article 199). De même, elles devront indiquer les actions et opérations qui permettront de valoriser les « continuités écologiques » (article 200).
• Pour les communes situées dans une zone fortement urbanisée, le règlement du PLU devra prévoir dans certains secteurs une part minimale des surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables (article 201).
• Lors de la délivrance d’une autorisation d’urbanisme, il sera possible de déroger aux règles relatives à la hauteur et à l’aspect extérieur des constructions prévues dans le PLU si le projet prévoit la végétalisation des façades ou des toitures (article 202). Des dérogations aux règles de hauteur pourront également être accordées pour les constructions faisant preuve « d’exemplarité environnementale » (article 210 ; on ne se hasardera pas ici à proposer une définition de cette dernière notion…) . Et si le projet vise à utiliser une « friche » – soit, selon l’article 222 de la loi ” tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l’état, la configuration ou l’occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables » – l’autorisation pourra déroger aux règles relatives aux gabarits des constructions dans une limite de 30 % (article 211).
• Le délai imposé aux collectivités pour dresser le bilan de l’application de leur PLU est ramené de 9 à 6 ans (article 203).
• Dans le périmètre d’une ZAC ou d’une Grande Opération d’Urbanisme, le règlement du PLU pourra imposer une densité minimale des constructions (article 208).
• La loi crée un nouveau certificat en matière d’urbanisme, le « certificat de projet » (article 212). Directement inspiré du certificat d’urbanisme, ce document vise à permettre à un opérateur qui porte un projet de réutilisation d’une « friche » d’être informé de l’ensemble du régime juridique applicable à l’opération. Ainsi le certificat pourra indiquer les régimes, décisions et procédures applicables au projet, les délais applicables et, éventuellement, les difficultés juridiques ou techniques pouvant empêcher sa réalisation. A l’instar des certificats d’urbanisme, les certificats de projet auront pour effet de cristalliser les règles applicables aux autorisations indiquées pendant une période de 18 mois. Mais, à la différence des certificats d’urbanisme, la délivrance du certificat de projet relève de la compétence du représentant de l’Etat dans le Département. On notera pour finir que, pour l’instant, cette innovation est introduite à titre expérimental pour une période de trois ans.
• Le droit de préemption des Départements en matière d’Espaces Naturels Sensibles est élargi, puisqu’il pourra s’appliquer désormais lors d’une donation entre vifs, à l’exception de celles pratiquées entre les membres d’une même famille (article 234). Le même article attribue également aux départements un droit de demander à visiter du bien avant de se prononcer sur l’exercice ou pas du droit de préemption.
• Le recul du trait de côte devra être pris en compte dans les documents d’urbanisme et notamment dans la définition de la bande littorale qui, le cas échéant, pourra excéder 100 mètres. La collectivité compétente devra également tenir compte de ce recul lors de l’examen des autorisations d’urbanisme (article 242). En cas de danger avéré, le Maire pourra même ordonner au propriétaire d’une construction de la démolir et ce, à ses frais. On notera que si une commune dont le territoire est situé dans la zone de recul du trait de côte n’est pas couverte pas un document d’urbanisme local (PLU, carte communale), elle devra en élaborer un.
• La loi crée un nouveau droit de préemption. Toujours pour tenir compte du recul du trait de côte dans certaines zones littorales, les communes concernées (ou EPCI compétents en matière de PLU) se voient dotées d’un nouveau droit de préemption afin de « prévenir les conséquences du recul du trait de côte » (article 244). La mise en oeuvre de ce droit devra alors respecter une procédure précise, laquelle est similaire à celle applicable lors de l’exercice du droit de préemption urbain.
Par Nicolas Polubocsko Avocat.