Dans le monde entier les forêts brûlent : des sécheresses exceptionnelles en Australie, en Russie et en Amérique du Nord ont précédé des incendies catastrophiques, l’avidité a réduit en cendres des milliers de kilomètres carrés au Brésil, bientôt la géographie qu’on nous a enseigné n’existera plus. La Corse connaîtra aussi des étés plus secs, plus chauds, toujours plus menaçants pour les massifs forestiers : les études du CEREMA sur l’impact du réchauffement climatique dans l’île sont sans équivoque pour la végétation. Nous assistons à une accélération certaine de phénomènes qui transforment irréversiblement notre climat et notre environnement. Et pourtant…
À Ajaccio, on continue de croire qu’il vaut mieux arracher les arbres sur le Cours Napoléon, en particulier sur un espace aussi symbolique que le quartier de la Préfecture. On s’acharne à croire que le Cours sera plus élégant en étant plus aveuglant, qu’il sera plus sûr en étant plus apathique, qu’il sera plus propre en étant plus sec. On ne comprend pas non plus comment un Préfet qui se prétend veiller sur l’environnement a pu laisser commettre ces abattages, sauf à vouloir donner du lustre au projet de Loi 4D en éclairant ostensiblement la position du palais Lantivy par des candélabres arrogants.
Au diable la fraîcheur qu’aurait pu préserver des arbres, pourtant, toutes les études le prouvent : les températures sous un couvert arboré restent supportables même en période de chaleur intense et protègent toutes les formes de vie contre une exposition au soleil qui peut être mortelle lorsqu’on approche les 50°. Dans ce quartier censé donner l’exemple, vous bâtissez un enfer minéral et propret, un pavage exemplaire d’ignorance et de mépris. Vous n’avez appris qu’à dessiner un avenir sans couleur et sans vie.
Même tableau à SARROLA où on affiche ses choix sans ambages : Place à l’économie de marché au mépris de la nature et du commerce traditionnel. À bas les arbres réservoirs de biodiversité, au diable la verdure ombragée, au diable les oiseaux, au diable le carbone qu’on aurait pu stocker, place au bitume et aux lampadaires. Place au désert stérile parsemé d’enseignes tapageuses, place au mirage des bonnes affaires.
À Ajaccio tout comme à Sarrola, on n’a toujours pas compris qu’il est peut-être déjà trop tard.
Le temps est pourtant venu de ne plus céder devant des choix imbéciles, la catastrophe qui vient sera sans pitié. Tout arbre mérite notre considération et notre intelligence : il sera le seul refuge naturel pour la vie aérienne, le seul répit que nous aurons en traversant une ville bétonnée ou en circulant sur une route surchauffée.
La décision de les avoir coupés restera impardonnable.
Le 15 juillet 2021